Ses critiques Théâtre classique: Hamlet -ce n'était que Shakespeare , et de plus , en francais Et si Shakespeare était digne du français ? Démonstration en est donnée depuis la première d'Hamlet, dans une version remarquable, nouvelle traduction en français, mise en scène avec maestria par Jean luc Jeener et ses acteurs au Théâtre du Nord ouest à Paris , le 18 décembre dernier . Rien n'est perdu du panache spectral et ténébreux à souhait, ni de la turbulence de cet improbable imbroglio, fleuron du barde pré-ossianique, colimaçonnant ses doutes et les perversités de ses personnages en miroir, parents et enfants, courtisans et clowns dans tous les recoins d'une terrasse d'Elseneur à surprise avec ses tours à fantômes, cimetières, chambres et salle d'armes diversement étagés en labyrinthe . Mais une remarquable clarté charpente l'ensemble, due tout d'abord à la gestion magistrale des grandes scènes de cour, fort reconnue de tous , spectateurs et protagonistes ,ces derniers dès l'entrée en jeu tous de dos, posture éloquente, face au pouvoir du couple royal très assuré Claudius et Gertrude, oncle et mère d'Hamlet , qui vient de perdre son père et homonyme, Hamlet. Puis avec la fameuse scène du " Meurtre de Gonzague ", piège du mime, exposé ici sans détour, nous convainquant ainsi qu'Hamlet de la culpabilité de Claudius, d'abord révélée par le spectre . Enfin dans les échanges au finale à fleurets et coupes empoisonnés méticuleusement réglée pour le plaisir du spectateur du piège ourdi par Claudius abusant de la crédulité de Laertes et conduisant à la victoire tragique de la mort universelle . L'action n'y perd rien, on le voit, en péripéties et en pathétique : oscillant entre furie vengeresse et doute ravageur, comme le pendule dédoublé des apparitions du spectre l'illustre à merveille , tant sur les murailles que dans la chambre de Gertrude tentant vainement d'apaiser son fils qui lui ouvre les yeux sur ses hontes ; elle est renforcée des affres des héros soumis aux transes de la folie. Ainsi Ophélie dans l'ensorcelante beauté de l'étrange ballet guidant ses pas hasardés déléguant à chacun une fleur quand elle perd le sens après le rejet d'Hamlet et l'annonce qu'il a tué Polonius, son père .Ou encore avec l'accouplement baroque d'Hamlet et de sa mère Gertrude consommant leur étrange relation brouillée .Et avant tout la déclaration " Etre ou ne pas être " inscrite judicieusement par le metteur en scène non dans un aparté mais intégrée au tendre désavoeu violent d'Ophélie contrainte comme lui à la rupture . Mais une initiative exceptionnelle reste toujours dévolue au prince danois dans son coquet habit noir lequel, en dépit de ses hésitations n'a rien ni du comique hésitant ni du malaimé efféminé en qui certaines traditions classiques et romantiques ont voulu le cantonner dans son opposition aux pourritures du royaume et du monde .Allant de l'un à l'autre , non sans amis fidèles , le solide Horatio, rivaux jusqu'à un certain point honorable (Laertes ), il va, fomentant ses pièges, capable de se fédérer les hommes d'action clairvoyants, nobles- Fortimbras, ici négligé, ou populaires -les comédiens, le fossoyeur et jusqu'au crâne de Yorick, sachant ne pas céder aux chausse-trappes des courtisans qu'on lui dépêche, comme les inénarrables Rosencrantz et Guidenstern dont l'imbécillité pataude est comme rarement mise en scène et démontée grâce à l'excellente agilité et physique et mentale du comédien redonnant toute sa vitalité et son prestige au jeune héros .Celui -ci rayonne d'un relief singulier, d'une aura résolument moderne .Pirouettant sur lui-même et dansant la " gaité " qu'il professe trouver à dénoncer les turpitudes du pouvoir et de ses alliés, funambulesque ici , comme plus tard avec le fossoyeur ,c'est ici qu'Hamlet -personnage et acteur – se rapproche le plus de cette " mâle gaité si triste et si profonde que lorsqu'on vient d'en rire on devrait en pleurer " que Musset, seul ou presque seul reconnaissait au Misanthrope redécouvert dans sa " soirée perdue au Théâtre français " .Shakespeare l'y précédait :anticipant l'absurde, dans ses apparentements des nuages tantôt au chameau, tantôt à la baleine, sachant jouer la farce, quand le jeu de mot s'y prête " retourner la bile " se doublant de l'invention d'une mimique, le héros et l'acteur ne risquent rien à user du calembour rabelaisien- " retour à la poussière ,sa mère, la Terre " , de la fantaisie macabre du grand branle des honneurs du roi voué à nourrir les asticots, à jouer aux boules avec les crânes de plastique .Comme dans Dom juan culbutant le raisonnement prétentieux de Sganarelle, nous nous laissons prendre par la causticité évoquant ces vanités vaines , d'autant plus résonnante aujourd'hui, en notre siècle hanté par l'impasse écologique . Bravo à Jean Luc Jeener, directeur de ce théâtre exigeant aux intégrales impressionnantes . Bravo à sa troupe de jeunes acteurs, enchaînant pour le plus grand nombre pour le plaisir de l'art cette pièce maitresse élizabétaine à la représentation de La Mouette de Tchékov, autre monstre d'un registre tout autre . Vous qui ne vous résignez pas à un théâtre frileux quant à l'action , ou confiné dans des conflits ouatés, vous qui aimez vous laisser surprendre sur scène ,accourez , vous ne serez pas déçus . Si de surcroit vous êtes nostalgiques de prose goûteuse (Rabelais , Ghelderode ) de sécheresse (Beckett) ,non sans poésie et violence (Koltés) ; de personnages et scènes de tonalité variées vous pourriez avoir du bonheu , et découvrir un jeu théâtral, qui même signé du grand Will, peut gagner à exprimer, brexit or not brexit, sa francité universelle . MILOC le 30 décembre 2019 : # écrit le 20/01/20
| -Un courteline endiable Étincelant:toute l'énergie farcesque courtelinesque et sa causticité revisitees a l'égide de l'homme aux rubans verts,diction et jeu remarquable de la bande d'acteurs aux rôles contrastes,mise en scène endiablee. # écrit le 20/02/16 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com
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