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Comédie: Jeux de Scène

-Un duo que tout opppose se retrouvera
Gertrude (Catherine LOMBARD) est une femme écrivain autoritaire et masculine alors qu’Hortense (Hélène ARIE) est une comédienne naïve voire futile. Les deux femmes autrefois amies (amantes ?) se retrouvent dans un théâtre pour répéter la pièce qui devrait sacrer Gertrude au rang des écrivains accomplis et offrir à Hortense un retour triomphal sur les planches. Leurs échanges sont basés sur une multitude de non-dits mais grâce à la mise en scène impeccable (Jean-Pierre ANDREANI) au service d’un texte puissant (Victor HAIM) les personnages ont la faculté de penser à voix haute et permettre ainsi aux spectateurs de cerner leurs personnalités. La pièce se déroule sur une scène épurée jusqu’à l’extrême : seuls une table, deux chaises et peu d’accessoires vont accentuer la mise à nue du duo. Les lumières guident le spectateur et jouent un rôle essentiel dans la perception des sentiments : elles éclairent les personnages par des couleurs tantôt criardes, intimes ou crépusculaires selon les émotions ressenties. En véritable dominatrice, c’est Gertrude qui ordonne au technicien de changer les lumières comme pour appuyer ses propos. Gertrude arrive la première sur scène. Elle installe, seule, la table et les deux chaises. Elle s’assied en face d’Hortense et entame la discussion. Elle domine son interlocutrice et domine ses propres sentiments. Lorsque Gertrude s’énerve, agacée par la futilité de la comédienne, elle hurle dans sa tête et doit faire un effort considérable pour parler calmement à Hortense. L’écrivain tourmentée n’arrive pas à expulser sa colère et la laisse bouillir au fonds d’elle même, au fonds de son âme. Hortense, d’apparence frivole, est pourtant dotée d’un véritable sens de la réflexion qui lui permet de voir juste au fonds des êtres. Gertrude s’en rend compte et décide spontanément que le personnage qu’elle a créée pour Hortense devienne aveugle. C’est à nouveau une façon d’imposer son hégémonie, de conserver son statut de dominatrice en la dirigeant, en la façonnant à son gré. La futilité, ou plutôt la naïveté, d’Hortense est appuyée par son comportement. C’est flagrant, voire amusant, lorsque perdue dans ses rêveries, elle se met à danser au rythme des pensées et allitérations scandées à haute voix par Gertrude. Peu à peu, le calme d’Hortense lui permet de prendre le dessus. La comédienne contrôle la situation et pousse Gertrude à enfin laisser expulser sa colère. Le venin est là et leurs paroles deviennent blessantes. Elle se parlent désormais et se disent enfin ce qu’elles pensent. Gertrude ne croit pas en la capacité d’Hortense à pouvoir jouer le rôle et la comédienne considère la pièce comme une petite pochade. La mise en scène elle même nous incite à suivre ce revirement de situation : Hortense s’assied sur la chaise de Gertrude, elle prend sa place. Peu après, elle lui joue une comédie macabre qui renvoie l’écrivain au rang de spectateur. Hortense, cette fois, s’impose et domine. Au début de la pièce, tous ces non-dits malsains les avaient laissées esseulées chacune de leur côté. Puis, le fiel de leurs aveux les éloignent comme pour mieux les rapprocher, avec douceur, lorsque la vérité éclate. Elles finiront ensemble à la même table, proche l’une de l’autre, mélangeant leur rire mais aussi leur sac, leur téléphone et leur carnet. Désormais elles ne font plus qu’une. Le spectateur qui avait étouffé sous le poids de leurs réflexions malsaines retrouve vers la fin de la pièce une véritable bouffée d’oxygène et se met à crier de l’art ! de l’art !
# écrit le 30/06/06