Théâtre contemporain: Le Chemin des Dames

-Une pièce pleine d'humour et pas seulement sur la Première Guerre mondiale
Ayant vu un extrait de cette pièce sur France 2 lors du 11 novembre, je dois avouer que je n'ai pas été déçu par la prestation des acteurs. Servi en effet par un très bon jeu d'acteur (qui a le mérite d'être fort sans aller au cabotinage) et par une excellente écriture, la pièce est remarquable. Il s'agit d'un huis-clos mettant en scène six personnages : trois militaires et trois hommes politiques. Faut-il lancer une offensive que certains prédisent comme un désastre? Au milieu comme arbitre, le Président Poincaré qui hésite, tergiverse entre les opinions, les expertises militaires, les considérations politiques et les rancoeurs personnelles (avec une double opposition civils/militaires et Nivelle/Pétain). La pièce s'axe donc tout autour du thème de la décision et de comment décider quand tout s'oppose et que les enjeux sont si grands. Entre démonstrations scientifiques menées par le ministre de la guerre Painlevé et grandiloquence de Nivelle, le spectateur apprécie l'humour orchestré par deux personnages : le général Micheler et le Président du conseil Ribot. Les jeux de mots s'enchaînent et permettent de donner de l'air à une décision grave. Déjà un million de soldats français sont morts et faut-il être prêt à en sacrifier encore un grand nombre pour obtenir la percée capable de mettre fin à la guerre? A noter le rôle de Pétain qui est fait d'allusions historiques à son rôle de la Seconde Guerre mondiale mais qui ici a le mérite de reconnaître la valeur qui fut la sienne durant le premier conflit. Si on ne peut apprécier le Pétain de 1940, il est bien que cette pièce reconnaisse le Pétain de 1917. La pièce s'achève sur la décision de poursuivre l'offensive car la refuser c'est l'immobilisme, la perte de crédibilité et peut-être la dernière chance de percer au moment où les divisions des Alliés vont quitter le front russe pour l'ouest à cause de la révolution de Février 1917. Presque une décision par défaut et prise dans un lâche soulagement pour éviter la crise immédiate qui surviendra deux mois plus tard quand l'offensive aura échoué et que 200 000 Français auront été tués par cette phrase : "L'offensive aura lieu". Ici, l'acteur jouant Poincaré rend très bien toute la complexité d'une décision et cette double sensation de légèreté/lâcheté qui suit une décision. Au final, la question n'est pas de dire oui ou non à l'offensive, mais de prendre une décision. En conclusion, une pièce à aller voir. On y passe un très bon moment, on s'amuse, on réfléchit et jamais on ne s'ennuie. Le grand mérite selon moi est d'avoir fait une pièce historique mais qui est intemporelle grâce au côté humoristique et à la réflexion sur comment prendre une décision.
# écrit le 02/12/17 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com