@465377 Vous suivez cet utilisateur Inscrit depuis longtemps 1 critique
Ses critiques Théâtre classique: Salomé -la bible aux enfants terribles 9/10 la Bible et le paganisme sauvage, les pré-raphaélites et la rigueur de Léonard, le mélange romantique, hugolien, shakespearien (ou peut-être tout simplement wildien) de la spiritualité la plus austère et du cocasse : c'est tout ce que cette mise en scène pleine de ferveur (leur âge n'explique pas tout, ils sont vraiment dévorés du zêle sacré du théâtre) nous donne à voir. Dans cette salle bien nommée des Enfants Terribles (et parfois on aimerait que le lieu lui-même le soit moins), le miracle opère immédiatement : une Cène s'est figée derrière un voile de gaze précieuse évoquant déjà Salomé; des sculptures humaines rajoutent à l'emphase tout en nous laissant pressentir que là va se jouer le drame; quelques battements de palme, pas de lever de rideau. Le silence se fait. La mise en scène de Charles Di Meglio crée la distance nécessaire à un drame biblique, mais sans briser cette distance, il dirige ses acteurs avec une maîtrise qui crée la tension et retient notre attention, des premiers gestes des gardes, des cris de Iokanaan au fond de sa prison hors-scène à la tragédie finale. Une seule ligne, un souffle, mais que de diversité dans ces figures ! des gardes tout droit sortis de Plaute, mais qui basculent brusquement dans l'horreur, un Iokanaan (Patrice Riera) vraiment inspiré, au regard d'au-delà, un couple royal (Céline Clergé, Matthieu Huot)remarquable dans son incompréhension tragi-comique du bouleversement téléologique qui se joue autour d'eux. Rarement aussi une Salomé (elles se contentent souvent au mieux d'avoir la plastique du rôle) n'a montré cette rencontre funeste entre le caprice sensuel, la vision révélée mais refusée du salut qui se montre et de la cruauté enfantine : Laurène Cheilan joue sur tous les registres. Percevrions-nous tout cela sans la somptuosité baroque des costumes, ce monde de fable où Cavaillé nous projette ? C'est un rêve éveillé que ce défilé de tentures, de bijoux, ou parfois tout simplement de nudités parées.Dans cette complexe architecture à l' agencement précis, où tout devient quand même lisible et limpide, c'est peut-être là que se noue l'homogénéité de ce spectacle si réussi, sur la base d'une pièce aussi ambitieuse qu'une tragédie classique, à la portée quasi-théologique et où Wilde a voulu à tout prix utiliser une langue qui n'était pas la sienne mais qu'il a transfigurée. Si le théâtre n'est pour vous que l'affaire d'un soir, si vous redoutez d'être renvoyé à vos tensions les plus intimes, à vos contradictions les plus obsédantes, ce spectacle risque de vous faire mal. Mais n'est-ce pas ce qu'on appelait la catharsis ? # écrit le 06/12/06
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