-bon moment Un bon moment de théâtre avec des comédiens qui sont bien choisis et tiennent leurs rôles. Beaucoup d'humour même si la pièce est un peu bancale et ne tient pas toutes ses promesses du départ. Et en cadeau bonus une jolie séance de séduction qui, elle, tient ses promesses # écrit le 01/12/24 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com
-une merveille Au départ, c'est une photo, publiée en mai 2004 par le Washington Post et reprise, ensuite, en France, par Le Monde. Cette photo a été prise dans la prison d'Abou Ghraib et elle représente une femme soldat (identifiée par la suite comme étant Lynndie England ) debout, les cheveux courts, vêtue d'un tee shirt foncé et d'un pantalon de treillis, et qui tient en laisse un homme attaché, à terre, dont on ne voit que le torse nu. La photo a fait scandale, ainsi que, de façon générale, le traitement que les militaires américains faisaient subir à leurs prisonniers irakiens. Et elle étonne, cette photo, elle met mal à l'aise, elle va chercher au fond de nous des abîmes insondables de brutalités et de fantasmes sadiques. Elle est comme l'émanation sulfureuse de nos gouffres intérieurs : parmi les raisons, bien entendu, le fait qu'il s'agisse d'une femme tenant en laisse un homme. Tel est le point de départ adopté par Claudine Galea pour se livrer, au cours d'un texte brillant, succession vertigineuse d'aphorismes à la fois cinglants et cyniques, à une sorte d'analyse tout à la fois sociologique, psychanalytique et intime, comme aimait à les pratiquer jadis Roland Barthes dans ses Mythologies. Son texte est brillamment incarné et défendu par Marine Gesbert. Quand on entre dans la salle, elle nous attend déjà. Au mur, derrière elle, est projetée la fameuse photo, celle de Lynndie England tenant en laisse le prisonnier. Marine, elle, est assise en position de lotus : peut-on davantage signifier l'opposition, le yin devant le yang, la sérénité devant l'horreur, la paix devant la déchirure ? Et durant une heure, elle va nous asséner le torrent abrupt des peurs enfantines, des angoisses personnelles, des conséquences humaines liées à ce cliché de guerre. Son débit est tout à la fois clair et précipité, telle une mitraillette humaine de mots et d'imprécations. Elle est toute douce d'apparence, blonde et gracile, avec un petit sourire espiègle façon Blanche Gardin. On lui donnerait le bon Dieu sans confession, tout en pressentant qu'elle se contrefiche aussi bien du bon Dieu que des confessions. Elle n'est pas là pour séduire ni plaire, elle est là pour parler de ce qui importe à l'égo tout en apportant au Monde entier : l'indicible poids de la peur, celle qu'on accumule en soi dès l'enfance, dès l'éducation, dès les premières humiliations et que l'on traîne ensuite, sa vie durant. Au bord : la jeune femme est au bord, perpétuellement, mais jamais " bordeline ". Elle parcourt l'espace, d'un bout de scène à l'autre bout de scène, pour parler de l'humain : car cette photo renvoie à l'humain, à l'horreur, à la violence, à l'intime ; car cette histoire est une histoire de coeurs que l'on malmène et d'humains que l'on torture, pas en Irak, pas au bout du monde, mais ici, au quotidien, à vous en écoeurer de vouloir faire des gosses. Au bord se joue tous les vendredis dans une petite salle coquette du 11e arrondissement : vous savez ce que vous ferez vendredi prochain. # écrit le 29/04/23 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com