" Tout conte de fées est un miroir magique qui reflète certains aspects de notre univers intérieur et des démarches qu'exige notre passage de l'immaturité à la maturité. Pour ceux qui se plongent dans ce que le conte de fées a à communiquer, il devient un lac paisible qui semble d'abord refléter notre image ; mais derrière cette image, nous découvrons bientôt le tumulte intérieur de notre esprit, sa profondeur et la manière de nous mettre en paix avec lui et le monde extérieur, ce qui nous récompense de nos efforts. "

Psychanalyse des contes de fées de Bruno Bettelheim
En préparant cette troisième édition de Confrontation, je relisais ces quelques lignes de Bettelheim et je ne pouvais pas m'interdire de penser à substituer dans ce merveilleux texte les mots " contes de fées " par " oeuvres d'Art " et découvrir ainsi un des meilleurs postulats qu'il m'aurait été donné de lire sur les Arts Plastiques. Dans ce monde virulent où nous subissons journellement les secousses telluriques les plus insensées, les agressions d'un réel auquel nous n'avions même pas rêvé, il nous a semblé presque comme une urgence d'apporter un peu de féérie, un peu de ce miroir magique dont nous parle si bien Bruno Bettelheim dans sa psychanalyse des contes de fée, ici, là, dès aujourd'hui.

Des structures sensibles et poétiques investissent l'espace en nous offrant une nouvelle opportunité de retrouver notre âme légère et insouciante d'enfant. Nous touchons grâce à elles au ré-enchantement du quotidien. Seule Lika Kato semble capable de mettre en mouvement et en lévitation ces installations d'une fragilité illuminée de l'intérieur.

C'est un univers acidulé que nous propose Juliette Chenais de Busscher, réalisatrice et photographe, où l'artiste cherche avant tout à travers l'autodérision à renouveler les codes esthétiques, en bousculant avec humour les grands mythes qui entourent historiquement la pose photographique. Au-delà il faut lui reconnaître une réelle prise de risque par une mise en abîme déjantée de son propre ego. La main impatiente de Brigitte Lurton l'emporte vers des contes aux univers graphiques étranges peuplés de héros insoupçonnés. Son apport dans cette confrontation artistique se situe dans l'acidité de son univers bruissant en perpétuel recréation, recréation qui aboutit à la construction d'une mythologie grinçante toute personnelle. C'est par la répétition réfléchie des gestes utiles que les pliures savantes de l'origami enfantent un nouveau monde empli de créativité.

Kim Quach offre une vie poétique aux matériaux pauvres que notre société postindustrielle a laissés pour compte. Nous assistons à la grâce de la création démultipliée.
" Je vous en prie, il faut y croire ; il y a des femmes qui en savent plus que nous, il y a des fées nocturnes et elles peuvent mettre tout sens dessus dessous. " nous disait Pétrone dans son Satiricon. Frédéric Cubas-Glaser