Dans la préface de sa pièce Marion de Lorme, en 1831, Victor Hugo déclare vouloir faire " un théâtre vaste et simple, un et varié, national par l'histoire, populaire par la vérité, humain, naturel et universel par la passion. "

Propos qui font écho à " la mission nationale, la mission sociale, la mission humaine " qu'il veut assigner au drame (1833, préface de Lucrèce Borgia). Victor Hugo cherche à fonder un théâtre populaire : un théâtre du peuple, sur le peuple, pour le peuple. Et sa plume construit, en plein coeur du XIXe siècle, ce mythe d'un théâtre tribune, démocratique et destiné à tous. Hernani est bien le précurseur de ce rêve éveillé : déjà, dans ce texte de jeunesse – Victor Hugo n'a que 27 ans lorsqu'il le signe – l'absolutisme royal est remis en question et le rôle du peuple dans l'exercice du pouvoir reste l'objet de vifs débats...

Civique et salutaire, édifiant et grotesque, le théâtre d'Hugo se fait théâtre du peuple avant l'heure. La perspective que nous favorisons dans notre travail consiste donc à s'emparer de ce classique et à y trouver un sens qui fait écho aux conditions d'écriture de l'oeuvre : révolution, esprit de jeunesse, audace et hardiesse. Mais sans nostalgie passéiste, avec l'espoir sincère de faire résonner la voix hugolienne dans notre siècle.

Hernani avec ses retournements de situation, ses quiproquos, ses travestissements, ses conflits et ses péripéties. Un théâtre de cape et d'épée, généreux et entier : du théâtre dans le sens plein du terme, c'est-à-dire capable de s'adresser au plus grand nombre. Cette fiction campée en pleine Espagne du XVIe siècle marque les débuts du drame romantique, genre inclassable et polémique.