You-You part à la retraite et son mot de départ file en quenouille. La secrétaire yougoslave lâche ses notes et dérive : les russes (pas tous communistes), le fils du ministre (fidèle à sa promesse), le Danube (pas bleu mais beau), le Pont des Arts (ses étudiants et ses sans-abri), ses souvenirs affluent et tombent, sans appel. Jovan Atchine signe en 1983 un texte vivant et décapant. Créée en 1993, la pièce garde une actualité intacte : ce destin humble et racé est universel et nous attrape tous. Dans la mise en scène délicate et parfaite de Élodie Chanut, Mina Poe nous ouvre le livre de la vie avec grâce et talent. You-You et les siens vont et voguent comme au gré d'un fleuve. Les peines, les joies et l'amour aussi. Nous volons avec elle et son jeune amant au Cabaret Tzigane, passons un Nouvel An deux enfants sur les genoux, entrons dans la cour d'un ministre un caillou dans la chaussure... Comme You-You revient au fil de son discours (jusqu'à une incroyable conclusion) Mina Poe tient celui de l'émotion avec un lent et savoureux crescendo. La salle est captivée. Parler des migrants avec cette flamme rayonnante et bienveillante est un vrai don : il faut courir en profiter et le partager. Sylvia Roux ravive dans son théâtre une pépite qui vaut tous les discours. Et beaucoup d'amour. Bravo ! # écrit le 11/10/17
Le jeune écrivain David Karrer (le bien-nommé) court après la sienne. Dans sa quête d'éditeur il rencontre 2 auteurs aujourd'hui fameux et hier en couple. Et puis il croise Christina secrétaire partagée et amour pas banal. Avec Traits-d'Union Murielle Magellan livre un quatuor littéraire et théâtral à la partition enlevée et savoureuse. Marie-Caroline Morel sa jeune (25 ans) metteure en scène donne vie, sens et actualité à cette fable universelle sur l'amour qui naît, s'efface et puis renaît. Dans un work-café accueillant et décalé, les acteurs réunis autour de Jean-Philippe Ancelle, le mentor-pygmalion qui retombe en amour en pleine mâturité sont au diapason : bravo à tous, Emmanuel Gaury, poète feu-follet au talent ravageur, Lou Lefevre, factotum-trait d'union efficace et craquant à l'empathie chaude et veloutée comme un violoncelle, Johanne Ricard écrivaine en mal d'inspiration et besoin d'amour. Vous êtes formidables : avec vous, le succès de l'été à Paris fait les beaux jours de la rentrée. Vive les prolongations ! # écrit le 19/09/17
Le poète du corps et des mots a la nuit pour amie et l'air est son amant. Roi ou mendiant, rock-star ou démon, Julien Derouault joue tous les rôles et se joue de tous les cadres. Le soir venu, il invite Aragon et Shakespeare, écrit dans l'espace, gravite sur leurs mots et danse sur sa voix. Vibrant, précis et passionné. Le comédien-danseur signe avec Marie-Claude Pietragalla une partition libre et profonde. Le public de la 1ère salue debout l'exigence et la beauté de ce seul-en-scène absolu et captivant. Bravo à eux deux et toute l'équipe de Sylvia Roux qui les programme, les accueille et les encadre pour ce succès total dont le choc et le charme opèrent longtemps. # écrit le 19/09/17
Juste derrière l'opéra, la jeune troupe nous accueille et souligne la nuance : "ou presque". Cette précaution prise, leur humour frivole et potache se déchaîne et entraîne Offenbach, son opérette et tout le public dans un tourbillon musical et parisien déchaîné. Les 5 artistes jouent, chantent, dansent et tanguent tous les rôles - pianiste compris - avec brio et un plaisir partagé. On aime et on rit. VRAIMENT. À voir ou revoir (la troupe se renouvelle) tous les samedis # écrit le 29/05/17 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com
"Et si l'on racontait des histoires qui servent à quelque chose ?" À 55 ans la Comtesse de Ségur se met à écrire avec cette idée en tête. Et bien d'autres souvenirs. Ce soir elle prend les traits expressifs, le ton riche et la voix nuancée de Bérengère Dautun pour nous dire sa vie, la distorsion de l'enfance, son sort de femme négligée, de mère éprouvée. Joëlle Fossier ciséle un texte fort, vif et émouvant : ses dialogues ouvrent une galerie de caractères que l'actrice inspirée et joueuse fait parler comme les livres de la Comtesse, mi-théâtre, mi-roman, au coeur de nombreux et rapides rebondissements. La mise en scène balise l'espace avec les repères familiers - les livres y sont des amis ouverts - et les images gravées à jamais dans ce bel esprit et cette âme infiniment slave. Le public savoure le bonheur de ce défi, provocant et réussi : ressusciter et nous faire aimer en 2017 une aristocrate immigrée, catho et conservatrice. Bérengère Dautun aussi savoure son bonheur au moment où la salle chante pour elle "Joyeux anniversaire". Émue elle nous fait avec sa grâce douce et déterminée son cadeau : un texte écrit par elle pour le Studio Hébertot de Sylvia Roux qu'elle jouera ici à la rentrée 2017. Le sujet ? Une femme unique, toujours, et d'origine russe, encore : Lou Von Salomé. A ne pas manquer comme le spectacle de ce soir :-) # écrit le 15/05/17 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com
Yohann Métay est intenable : au café avec ses potes, au milieu des sapins avec les marmottes, sur scène avec son histoire "à courir de rire". Il nous entraîne avec lui dans une course incroyable où le rire l'emporte à chaque seconde. A voir et revoir absolument ! # écrit le 09/05/17 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com
Peter Maxwell Davies tire The Lighthouse d'un fait divers écossais réel et fantastique. En 1900 des marins découvrent un phare vidé de toute humanité. Que sont devenus ses gardiens ? Tradition et modernité, raison et obscurantisme, force et esprit s'affrontent dans ce huis-clos, chef d'oeuvre musical et dramatique. Alain Patiès signe la m-e-s réaliste et efficace qui invite le spectateur à forger sa propre opinion sur les mystérieuses disparitions. Les trois gardiens aux tâches que l'automatisation guette sont de forts caractères : Christophe Crapez, Paul-Alexandre Dubois et Nathanaël Kahn leur donnent vie avec talent et engagement, sens et émotion. Philippe Nahon et son ensemble Ars Nova nous ouvrent le coeur d'une musique riche, profonde et magique. Au même titre que Jean-Yves Aizic chef de chant attentif et inspiré du plateau si bien préparé. La Grande Fugue produit ce spectacle unique et vibrant dont on guette une prochaine et heureuse reprise. # écrit le 02/05/17 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com
Lorànt Deutsch achève la 18ème version de son script, nourri par sa propre inspiration - son personnage de scénariste en déborde autant que d'anxiété - et les itérations de la production - en quête de capitaux US inversement proportionnels à l'âge du héros -. Entre amitié et boulot, famille et ambition, Belle-Ile et St-Pol-de-Vence, il vit une tempête au jour le jour. On le suit d'autant plus que tous les acteurs sont attachants et justes dans une pièce qui parle du show-business et de ses faux-semblants avec cynisme et tendresse. Un doux mélange ! # écrit le 20/03/17 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com
Après 4 tours de France les vikings de la chanson reviennent à Paris. Ces vrais allumés et faux suédois déversent leur folie douce sur le Tøp 50 des années 80. Leur humour potache, musical et décalé embarque l'Européen, le public en chåleur en redemande : du bønheur ! # écrit le 06/02/17 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com
Anne Bouvier met en scène le beau texte simple et poétique de Joëlle Fossier et nous le rend encore plus intime et lyrique. Le paradoxe et la tension sont sensibles et palpables : la fenêtre de prison, hune ouverte sur l'horizon, les voiles qui attendent un souffle... Celui du trio d'actrices est naturel et habité : nous vivons cette rencontre particulière de l'intérieur. "En prison soit on se parle jamais soit on se connaît depuis toujours" dit Suzanne à Blandine qui va partager sa cellule, y commencer sa vie et découvrir l'amour. Le public est conquis par cette rencontre intense sous surveillance : la fille de marin-pêcheur, la professeure de français et la gardienne de prison nous plongent chacunes dans leurs vies avec une belle présence. Ce qui se passe sous nos yeux compte autant que ce que l'on ne voit pas ou devine. Alors l'art du récit et de l'élipse prend tout son sens, comme dans la tragédie. Et les larmes nous viennent à l'écoute et la vue simple de ces vies rêvées et de ces vies volées. Cette nouvelle pépite ouvre le cycle des Amours Singulières voulu par Sylvia Roux pour son Studio Hébertot : il faut vite aller l'y voir briller. # écrit le 06/02/17