" A l'aube, j'ai rencontré mon voisin Oreste "ou comment rendre familier à un spectateur moderne le mythe antique des Atrides ?A lui seul ,ce titre insolite éveille la curiosité et résume le défi que relève la pièce de Nicole Buresi.En effet,par la magie de la réécriture,le mythe s'actualise et se réinvente sous nos yeux. Le jeune Oreste ,rentré d'un stage à l'étranger,à la fois récitant et personnage ,convoque six années du drame familial.Dans un monde,non plus de rois,mais de chefs d'entreprises florissantes ,les vents de la finance ont remplacé ceux de la rade d'Aulis .Nous ne sommes plus à Mycènes ,mais dans une moderne City.Quant à Clytemnestre ,la voilà ici, confrontée au drame de la vieillesse de sa mère Léda. Prise alors de désarroi,au coeur d'une famille déchirée et recomposée ,elle acquiert une surprenante dimension humaine . C'est ainsi que tout en restant fidèle à la légende, la pièce parvient à faire de ces illustres personnages nos " voisins ".Nous les reconnaissons pour tels,nous souffrons avec eux parce qu'ils nous ressemblent et parce qu'ils vivent notre vie .Leur solitude et leur angoisse nous concernent et nous émeuvent. Emotion due à la force des personnages ,mais aussi à la force du texte.Vitalité et vivacité des scènes de dialogues alternent avec l'intensité de monologues où s'expriment tour à tour détresse et tendresse,poésie et rêve. Des acteurs de talent servent avec bonheur ce spectacle dont le rythme ne faiblit jamais .Justes et vrais dans une mise en scène sobre, mais pleine de ressources,ils s'imposent par leur présence. Un tel travail théâtral illustre bien le mot de Ionesco : " Ce qui compte au théâtre ,c'est la chair et le sang des idées ,leur incarnation,leur passion ,leur vie. " # écrit le 08/04/15