patramarga

Théâtre classique: Le faiseur

-Les dérives de la spéculation financière : Balzac toujours d'actualité
Une mise en lumière des rouages d'une société rongée par la spéculation financière. Une société où l'on ne saurait vivre -bien- d'un emploi honnête et d'un salaire, qu'on méprise et qu'on raille...Les "perdants" de ce système économique n'y ont plus leur place. Brillante démonstration de Balzac avec une langue extrêmement efficace, aussi lucide qu'hilarante. On a grand plaisir à l'entendre. Et le propos est d'une telle acuité et d'une telle actualité... En effet, sans pour autant jamais envisager d'occuper un emploi salarié, on s'enferre, si l'on veut échapper à la ruine financière et sociale, .......dans toutes les sortes de duperies qui visent à assurer sa survie dans un monde parfaitement cynique. Les seules règles: duper, tromper, manipuler, faire appel à tous les artifices pour se sortir des situations les plus risquées, les plus périlleuses, et parer, dans l'extrême urgence, aux plus grandes catastrophes..... Du Grand Art! Et Mercadet est un maître en la matière! D'autant qu'il excelle à imaginer des opérations qu'il pare de toutes sortes d'attraits juteux et qu'il "vend" avec talent. Tout le monde court après l'argent. Mais il faut reconnaitre que, doté d'une grande finesse, d'un art consommé du jeu et de la comédie, et d'une excellente maîtrise de l'effet des rumeurs en Bourse, il peut compter sur les travers de son entourage (créanciers, spéculateurs, usuriers, apprentis-boursicoteurs...) dont il exploite habilement l'avidité, la naïveté, le désespoir, le calcul.....pour mener à bien ses opérations. Il n'hésite pas à faire de même avec ses proches, femme, enfant, domestiques, ami... Car tout le monde est pris dans les mêmes filets et "règles"de ce monde implacable et cynique. Très belle mise en scène de R.Renucci et excellent jeu des 10 comédiens, absolument parfaits. De très beaux costumes raffinés et des maquillages, des perruques qui rappellent Daumier Un rythme effréné, et effroyable, qui nous laisse pantelants. Sous le rire, le grotesque et la force du trait que permet le théâtre, perce l'effroi...! Les Tréteaux de France, CDN itinérant, qui pour une fois, et pour un mois, se sont arrêtés à Paris, à l'Epée de Bois sont à découvrir absolument.
# écrit le 20/06/16

Seul(e) en Scène: Noémie Caillault dans Maligne

-Vitalité, dérision et humour fous!
Une jeune femme pétillante, toute en énergie et en charme et, à l'humour ravageur, très pudique. Un thème pas facile non plus. Une fine observatrice des maladresses d'un entourage désarmé devant une maladie qui fait peur à tous. Mais aussi, des travers du corps médical, très concentré sur les diagnostics et les traitements des patients, absorbé par le "technique", au détriment de "l'humain" et du "personnalisé", dont le malade a pourtant tant besoin dans ses rapports avec les différents personnels médicaux Le Public de la salle (surtout des jeunes hier soir) rit beaucoup....et certains très fort... Pour conjurer le sort et la maladie? Je me demande juste comment, à ce spectacle débordant de vitalité, réagissent des malades actuellement en traitement et qui n'ont ni l'énergie, ni la créativité ou les singularités de Noémie Caillault. Vraiment très courageux de sa part d'avoir écrit "ce journal de combat", d'avoir aiguisé des talents qu'elle portait en elle et de nous faire partager cet hymne à la vie. Sans doute un spectacle très salutaire pour parachever son combat. Et, pour nous rappeler, à nous Public, que nul n'est à l'abri .... Ce qu'on peut lui souhaiter maintenant c'est de passer à d'autres rôles et d'autres spectacles. Sa prestation est évidente... C'est une comédienne! Le metteur en scène M.Perez l'a bien compris avec une scénographie sobre qui laisse toute la place au texte et à l'interprétation. Enfin je suis d'accord, avec elle, l'Hôtel Dieu a une bien jolie vue sur Notre Dame et ça aide! Dommage que le service d'Oncologie n'y soit plus.
# écrit le 17/06/16 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com

Théâtre classique: Un songe d'une nuit d'été

-Un Songe enchanteur....
Beaucoup de charme, de poésie, de grâce, de fraîcheur. Merveilleuse idée que de mêler cette version -petit format- du Songe du grand William à des extraits du "Fairy Queen" de Purcell. Excellente interprétation des 10 comédiens/chanteurs/musiciens. Belle utilisation de l'espace scénique avec des moyens pourtant modestes. Costumes recherchés et raffinés. Mise en scène sobre mais efficace. Une soirée qui m'a procuré un très grand plaisir. Le théâtre 14, une fois de plus, offre une programmation de qualité.
# écrit le 12/06/16 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com

Théâtre contemporain: Je descends souvent dans ton coeur

-La perte et la douleur de l'absence
Un sujet difficile: évoquer la disparition précoce d'une mère au terme d'une sale maladie Ai eu du mal à être touchée....en dépit d'une belle interprétation des 2 comédiennes qui incarnent deux personnalités très contrastées (frivolité contre immaturité) Sans doute suis-je restée étrangère et ai été gênée par l'évocation d'une extrême dépendance de la fille vis à vis de sa mère comme vis à vis de l'idole. En tout cas, c'est courageux de la part de la jeune actrice - la fille- (et sans doute salutaire pour dépasser une perte irréparable et injuste)d'avoir choisi d'évoquer un sujet intime aussi cruel et d'avoir décidé d'en faire quelque chose. Malheureusement, dans mon cas, les mots choisis n'ont pas trouvé d'écho. Sans doute en raison dont chacun vit ses deuils Sinon, cette petite salle très intime (accueil sympathique) dans ce quartier plein de charmes vaut le détour.
# écrit le 06/05/16 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com

Théâtre contemporain: Par-delà les marronniers

-Une sortie de l'oubli un peu ratée: pièce inaboutie, dommage pour les acteurs et pour les 3 dandys dada!
Une excellente idée que d'avoir voulu sortir de l'ombre, Vaché, Crévan et Rigaut, ces 3 chevaliers dadaîstes, à la vie brève, "résistants" de la première heure à la"grande guerre" mondiale Une occasion, que l'on pensait prometteuse, de découvrir les trois dandys dada dont je n'avais jamais entendu parler. Le choix du mode cabaret pour cette évocation paraissait une bonne idée pour apporter un peu de fantaisie et de légéreté à une évocation qui s'annonçait grave, pessimiste et, sans doute, absurde et pleine de dérision. Celui de la scénographie aussi: une scénographie à grands moyens et plutôt réussie (décors, costumes, musique), d'autant qu'elle est bien servie par les excellentes Sophie Lenoir, Alexie Ribes et la chanteuse lyrique Aurore Ugolin, autant meneuses de revue que personnages à part entière dans la vie des 3 dadaïstes, tout comme par l'homme multi rôles, Stéphane Roger. Ils assurent tous les 4, superbement. Mais tout ceci -un peu convenu d'ailleurs- étouffe complètement ce pourquoi le projet semblait construit: ressusciter devant nous les 3 dandys. Le texte inabouti, décousu, mal construit, manque de percutance et, laisse en marge les 3 héros que nous ne découvrons pas véritablement, même si l'interprétation des artistes (Fau, d'Abboville, Lassince ) n'est pas à mettre en cause. Ils s'en sortent même plutôt bien et mettent autant d'entrain que la situation et la pièce le leur permettent. Mais on s'attendrait à un texte et une mise en scène qui se centrent davantage sur eux. et à une évocation plus approfondie et plus claire. On finit par s'ennuyer et par regretter qu'envahi par ce mode cabaret trop prégnant, l'hommage à ce trio ne soit pas rendu comme il le devrait....et que l'émotion comme le rire en soient quasiment absents. Il ne nous reste plus qu'à lire le programme.(plus explicite que ce qu'on a vu sur les intentions visées) ... et, à aller directement aux écrits des 3 dadas pour en apprécier la saveur, l'absurdité, la provocation, la noirceur désespérée, le cynisme et faire résonner en nous l'esprit dada.
# écrit le 10/04/16

Théâtre contemporain: Eichmann à Jérusalem

-La banalité du mal: un vertige qui saisit et est toujours d'actualité
Point de nouvelle version du procès. Point de nouveau questionnement sur la culpabilité de A. Eichmann. Point de nouvelle dénonciation du système de défense choisi... Tout a déjà été dit! Et il ne viendrait à personne l'idée de vouloir le remettre en question.... Par contre, ce spectacle, aussi sensible, intense que sobre, dans son jeu et dans son traité résolument minimaliste, ô combien efficace, créé par la jeune et brillante troupe du Théatre Majâz, affronte courageusement les ignominies de notre temps... Et nous invite à y réfléchir et, à nous interroger sur nos responsabilités individuelles comme sur les conséquences de nos démissions quotidiennes. Il s'appuie sur des extraits de textes de H. Arendt, G. Sholem, A. Less ou, sur des minutes du procès, pour nous interpeller sur la malheureuse permanence des conditions qui mènent des êtres ordinaires, anonymes (et dans ce cas précis, de surcroît falots) à prendre des décisions terrifiantes, aux conséquences criminelles, sans le moindre sursaut d'humanité, d'émotion, ou de regret ...ou, à les laisser faire.. sans la moindre trace d'esprit critique ou sans la prise de conscience d'une nécessaire désobéissance collective. Y aurait-il vraiment quelque chose de changé depuis la parution de ces écrits et la tenue de ce procès, rien n'est moins sûr. Les événements se répètent à l'infini, sous des formes variées, si l'on songe à la servilité dont font preuve, ceux qui au prétexte d'efficacité, de recherche de résultats, se soumettent aux lois de groupes dominants implacables, aux logiques discutables des raisons d'états, aux exigences mortifères des marchés ou de la finance pour accomplir des actes odieux et, obéissent aveuglément, enfermés dans une logique consensuelle, grâce à laquelle ils se dédouanent de toute forme de responsabilité. La cage de verre est-elle vide? ou bien une partie de chacun d'entre nous s'y trouve-t-elle encore enfermée? puisque tout, -même le plus horrible-, est toujours possible. Exemplaire, courageux, déterminé, le travail de cette jeune troupe, après son spectacle "Les Optimistes", nous démontre, une nouvelle fois, qu'il n'est sans doute pas trop tard pour, encore et encore, s'interroger et réagir. Ce spectacle nous prouve, aussi, combien un travail de troupe bien élaboré et exigeant, à partir de ce qui fait notre mémoire collective, peut être un terrain fertile pour envisager un autre avenir et, l'occasion d'échanges fructueux avec le Public. La maturité de ces jeunes comédiens et leur optimisme, comme l'extrême qualité de leur travail nous sont précieux.
# écrit le 01/04/16 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com

Théâtre contemporain: Paris nous appartient

-On s'y perd!
Un mélange des genres confus.... En voulant coller au cahier des charges du "Festival des illusions" (ouvrir des passerelles entre diverses disciplines) il semble que ce projet se soit un peu égaré. Des objectifs trop ambitieux et une concrétisation assez peu convaincante. J'avoue n'avoir pas bien compris où l'on voulait en venir et m'être passablement ennuyée. J'ai aussi souffert pour ces jeunes comédiens, certes enthousiastes, mais cela ne suffit pas. La grande salle du Monfort ne convenait pas non plus...plateau immense! Théâtre documentaire : l'évolution de Paris et sa banlieue, beaucoup le 93, avec des dialogues de peu d'intérêt théâtral et fort longs dans le cadre de réunions de travail plutôt ennuyeuses... Une illustration par des chansons d'une autre époque, d'un registre certes amusant, -Offenbach-, des airs connus pour la plupart, mais pas très bien exécutés (justement le risque est grand de faire moins bien!) et, qui semblent tomber là, sans grand lien avec ce qui précède. Le mélange réalité et fiction n'a pas pris. Et de longs et lourds échanges-bavardages d'une bande de jeunes s'interrogeant longuement sur "comment dépenser 280 euros à 7 (ou 6)"pour une soirée qui se promet d'être ratée Et aussi du texte de qualité (Victor Hugo par exemple) qui se perd dans ce magma. L'idée de départ aurait pu intéresser. Une belle idée pour un spectacle qui reste à reconcevoir, élaguer-beaucoup- ordonner -rendre les choses lisibles- retravailler, améliorer car dans l'état ....c'est bien long....
# écrit le 20/03/16

Théâtre contemporain: Superbarrio

-Une demi-réussite
Le projet intriguait. Nous faire découvrir un épisode réel de la vie mexicaine (dont je n'avais pas connaissance): celui de l'engagement d'un simple homme du peuple pour défendre les droits des sinistrés, laissés à l'abandon après le tremblement de terre de 1985, face à l'incurie, à la collusion et au cynisme des politiques et des "capitalistes". On reste un peu sur sa faim. Sans doute parce qu'on s'attendrait à une écriture à la couleur plus baroque, plus vive, plus foisonnante, plus excessive, pour traduire l'atmosphère du lieu, de l'époque et convaincre de l'embrasement des foules à la suite de Superbarrio et des pugilats qui s'ensuivirent entre détracteurs et soutiens. Pas assez de passion et d'excès et sans doute, pas assez de personnages et de situations variées, pour traduire l'embrasement qui donna naissance à ce mouvement. Les comédiens, dont certains incarnent plusieurs rôles, s'en sortent bien (un peu moins la "capitaliste" que l'on ne sent pas à l'aise dans ce rôle et donc, beaucoup moins crédible) Bonne utilisation du plateau avec une scénographie assez vive, plutôt bien pensée. Et l'apport de la contrebasse est une merveilleuse idée qui apporte beaucoup à ce spectacle. On aurait aimé être plus convaincu par cette pièce. Le conte social attendu n'a pas tout à fait fonctionné.
# écrit le 20/03/16

Seul(e) en Scène: Le Monde d'hier

- Un testament émouvant, et tragique
Un monde qui n'est plus... La Vienne culturelle des Artistes, au tournant du 20ème siècle, telle que l'a connue S.Zweig dans sa jeunesse. Puis, la mort de cette Europe et ses tragédies: les guerres, la perte de liberté de l'esprit, l'anéantissement des idées et de la civilisation, l'avènement du nazisme et des totalitarismes. Jérome Kircher, par son jeu sobre, dans une scénographie qui l'est tout autant, à partir de quelques pages, bien choisies et bien articulées, entrouve pour nous l'accès à ce puissant livre-témoignage de S. Zweig. Nostalgique et bouleversant. Ce spectacle, de grande qualité, outre l'émotion qu'il procure, nous donne une furieuse envie de nous plonger sans tarder dans ce livre-testament pour prolonger le plaisir qu'on a eu à en découvrir de très belles pages.
# écrit le 19/03/16 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com

Comédie: Pinocchio, Sganarelle et Le Carrosse Enchanté

-Que du bonheur ..et tant de charme....Surtout ne pas s'en priver!
Lieu unique à Paris (et en France) de Comedia dell Arte, la Comédie Italienne pratique un art du théâtre si rare, qu'il faut connaitre, défendre et préserver. Hall d'entrée et salle de spectacle joliment décorés (foisonnement de masques, costumes ou peintures )on est tout de suite imprégnés d'une atmosphère hors du temps, raffinée et baroque Charmant spectacle imaginé pour les enfants, qui rassemblés sur les premiers rangs sont invités à monter sur scène à plusieurs reprises pour y prendre part. Au début un peu intimidés, ils se prennent vite au jeu et sont enchantés, tel mon petit compagnon de 7 ans. Les 2 comédiennes sont parfaites (l'une campe d'ailleurs 3 personnages du conte au côté d'un charmant Pinocchio)et savent mettre à l'aise les petits spectateurs avec beaucoup de doigté. L'histoire, bien menée, permet de développer tous les talents propres à cet art théâtral (notamment une gestuelle très évocatrice, et le jeu des voix). Très beaux costumes, jolis masques, accessoires superbement décorés -le carosse enchanté, l'oiseau, le monstre-, décors en toiles peintes très raffinés. Les enfants comme les adultes passent un délicieux moment. La Comédie Italienne qu'il faut absolument découvrir, encourager et soutenir. C'est une petite salle de théâtre précieuse. On ne peut la manquer ..Sa jolie façade, toute bleue et baroque, rue de la Gaîté, se remarque, intrigue et invite à passer la porte. On ne le regrette pas!
# écrit le 05/03/16 , a vu cet évènement avec BilletReduc.com